“Marchés Finance : Comment désinvestir pour le private equity ?” – La Tribune desfossés
Marchés Finance : Comment désinvestir pour le private equity ?
Améliorer les performances, PAR T. LE JOUBIOUX ET C. MUSTAD (*)
Le succès de l’investissement dans les sociétés non cotées pousse les investisseurs à exiger des gérants la redistribution du capital. Cela passe par un désinvestissement qui peut emprunter diverses voies.
Si la réglementation financière et boursière s’est développée à foison, l’investissement dans les sociétés non cotées connaît paradoxalement un vif succès. On peut se demander si le private equity ne profiterait pas de cette surabondance de réglementation pour les sociétés cotées. Pourtant, pour réaliser des performances en private equity, il faut pouvoir désinvestir. Deux variables majeures déterminent le succès et le type du désinvestissement : les conditions du marché et la qualité de l’investissement en termes de management, de revenus et de coûts. Plus le temps passe, plus les associés gérants sont mis sous pression pour redistribuer le capital aux investisseurs. Quels sont les types de désinvestissement qu’ils opèrent ? On distingue trois types majeurs de sorties et un groupe mixte. Le premier est constitué par les offres publiques de vente (OPV). Cette méthode n’a représenté en 2005 que 2 % du nombre des désinvestissements et 4 % en valeur. Ce mode concerne surtout les plus grandes entreprises, étant donné que les entreprises en portef euille devront avoir six à huit trimestres de croissance avérée pour trouver des acheteurs. Une variante – la vente d’actions cotées – consiste en un désinvestissement postérieur à l’introduction en Bourse. C’est la dernière alternative, concernant en général des entreprises plus modestes. L’associé gérant va là attendre une hausse des cours, probablement à l’aide d’une solide communication financière, pour se désengager. Il s’agit de la stratégie la plus opportuniste.
GRANDES MANOEUVRES
L’autre type de sortie est la vente de gré à gré,à une société industrielle ou de services. Les motifs pour l’acquéreurpeuvent être d’ordre financier, technologique ou stratégique. C’est ainsi la stratégie de désinvestissement, que visent initialement 80% desassociés gérants, en général assez tôt dans le cycle del’investissement. La vente stratégique est cependant corrélée au dynamisme du marché des fusions-acquisitions. Ainsi en Europe, en 2005, les ventes de gré à gré représentèrent 25% des désinvestissements en valeur, soit la première alternative. L’année 2007 devrait connaître encore de grandes manoeuvres, notamment dues à l’abondance deliquidités sur lesmarchés. Le second type de vente de gré à gré est la revente des parts acquises par le fonds au fondateur ou à d’autres dirigeants, totalisant 18%du nombre des désinvestissements contre 7 %en valeur.
Le rachat de l’investissement par un second fonds est le troisième type de sortie. Phénomène nouveau dans l’industrie, il est de plus en plusfréquent et semble devoir durer. Depuis la reprise boursière en 2003,les fonds ont levé tant de capitaux que l’offre est aujourd’hui excédentaire. Ainsi, certains fonds négocient continuellement les uns avec les autres. En 2005, si 6 % du nombre des désinvestissements étaient des rachats par des seconds fonds, ils représentent 18 % des désinvestissements en valeur. Il semble que les plus grandes entreprises restent dans le giron des fonds. Autre variante, la vente à des institutions financières, poursuivant un objectif de diversification, a atteint 2 % du nombre des désinvestissements, contre 5 % en valeur. Dans le groupe mixte, en premier, on trouve le remboursement du prêt ou des actions privilégiées. Les flux de trésorerie générés par l’entreprise sont ici suffisants pour rembourser le prêt concédé par les investisseurs, il s’agissait en 2005 de la première alternative en nombre, soit 21 % des désinvestissements. On peut aussi citer en dernier la vente de segments ou d’actifs secondaires à l’activité. Toutefois, tous les investissements ne sont pas profitables : en 2005, environ 12% du nombre des investissements sont passés en perte. Cette part tend à augmenter, les années de crash avec, en 2001, 26 % du nombre de ces investissements passés en perte.
UNE SOPHISTICATION CROISSANTE
Globalement, les statistiques de désinvestissement dans le private equity en Europe témoignent d’un secteur en rapide maturation. D’abord,les investissements non réussis, passés en perte, diminuent sensiblement en pourcentage des montants totaux désinvestis. Ensuite, la croissance de ces totaux se fait indépendamment des aléas de l’appétit des Bourses pour les offres publiques de vente, comme le montre la relative stagnation de ce type de désinvestissement. Les voies traditionnelles de désinvestissement – ventes de gré à gré et sorties mixtes – gardent toute leur place, en évoluant dans la manière dont elles sont mises en place et exécutées.
Enfin, la croissance des désinvestissements par vente à un autre fonds met en relief le degré de maturité du secteur. Les optimistes y verront le signe d’une sophistication croissante permettant aux fonds d’optimiser la gestion de leur portefeuille, et les pessimistes les signes avant-coureurs d’un retournement de tendance.
(*) Edgar Brandt Advisory SA