Newsletter – Septembre 2011

Août 29, 2011

 

A l’affût dans le noir

 

Mouvements des taux de change, indécision au sujet de la gestion de la dette au sein des pays de la zone Euro et aux Etats-Unis, risque d’un nouveau ralentissement sérieux, tout cela dans un monde où toutes les économies nationales sont plus que jamais interdépendantes. Les inévitables conséquences des nécessaires mesures prises par les gouvernements pour prévenir une dépression lors de la dernière crise économique nous plongent tous dans un contexte marqué par un exceptionnel degré d’incertitude.
Pour les entreprises qui sont d’ores et déjà confrontées à des difficultés, cette augmentation du degré d’incertitude ne change que peu de choses aux défis très concrets et immédiats auxquels elles doivent faire face. Quand le carnet de commandes n’est plus à la hauteur de la base de coûts, ce sont les actions immédiates qui occupent les esprits.
C’est pour les autres entreprises, celles qui ne font pas face à des difficultés immédiates, que ce contexte pose un véritable défi. La vague de mondialisation que nous traversons, phénomène encore récent à l’échelle historique, continue de redistribuer les cartes de manière dynamique dans la plupart des domaines d’activité. Ce cocktail de dynamique structurelle en évolution et d’exceptionnelle incertitude conjoncturelle rend tout exercice de planification extrêmement hasardeux.
Que faire donc dans une situation où l’on sait que les choses bougent, que quelque chose va se passer, mais que l’on ne peut clairement anticiper ni le quoi, ni le quand ? On n’évoquera pas ici les nombreuses métaphores sportives qui peuvent illustrer cette situation ; il est clair que ce qui est en jeu, c’est la capacité des entreprises à réagir vite et bien. En un mot, leur agilité.
Aucune organisation ne saurait être naturellement agile. Au contraire, le terme même d’organisation suggère que les rôles respectifs, les pratiques et les activités de chacun sont définies afin de sécuriser le bon fonctionnement de l’ensemble et sa productivité. La tendance naturelle d’une organisation est de se figer dans un mode de fonctionnement et de répliquer celui-ci dans la durée. C’est afin de contrecarrer cette tendance que Jack Welsh, sans doute le plus célèbre parmi les CEOs, s’assurait que chacune des nombreuses entreprises du groupe General Electrics soit sujette à une réorganisation majeure tous les trois ans.
L’enjeu donc pour beaucoup d’entreprises aujourd’hui est d’augmenter leur agilité. Il s’agit là d’un objectif différent que celui qui consiste à diminuer les coûts ou à chercher des améliorations de productivité. Plus que de trouver des solutions, on cherche dans ce cas à mobiliser les forces vives de l’entreprise, à les extraire des modes de fonctionnement stables du quotidien pour mieux les préparer à réagir aux changements à venir, quels qu’ils soient. Les démarches les plus efficaces mises en place par les entreprises dans ce cadre sont ce que l’on pourrait appeler des programmes de revitalisation.
L’approche « à la Jack Welsh » de ces programmes consiste, dans une démarche top-down, à annoncer une refonte de l’organisation de l’entreprise déjà définie dans ces grandes lignes et dont les équipes au sein de l’entreprise concernée doivent ensuite mettre en œuvre les modalités concrètes. Le changement annoncé ne constitue pas en général une prise de risque importante. En effet, pour chaque entreprise, plusieurs options en matière d’organisation sont toujours envisageables, et le choix effectué pour ce type de démarche consiste simplement à remplacer l’option en place par une alternative.
Cette approche rompt en effet la routine organisationnelle et, comme toutes les démarches purement top-down, aboutit rapidement. Le risque est que le changement étant vécu comme complètement imposé, les collaboratrices et collaborateurs ne soient pas inspirés mais usés par l’exercice, ce qui peut donc être contre-productif au regard de l’objectif poursuive.
Une alternative plus participative est souvent préférable. Touchant l’ensemble de l’organisation, et regroupant chacune des équipes dans une démarche participative, ce type d’approche permet typiquement à chacun de s’extraire des modes de faire établis, de les expliciter et de les évaluer, dans le but de proposer des améliorations. Ces propositions, souvent très concrètes et applicables dans la mesure où elles viennent directement du terrain, constituent un plus pour l’entreprise. Mais le principal bénéfice de ce type de démarche, c’est le changement d’état d’esprit qu’il induit chez ceux qui y participe.
Ce type d’approche prend plus de temps que l’option top down, mais cela n’est pas nécessairement handicapant car même si les efforts en cours doivent être interrompus par l’irruption d’un changement significatif dans l’environnement de l’entreprise, ses objectifs sont déjà atteints : moins engoncées dans l’existant, les forces vives de l’entreprise sont bien plus disponibles au changement, et cet effet ne s’estompe que lentement. L’organisation est donc notablement plus agile.
Naturellement, le lancement et la gestion de ce type d’exercice ne sont pas dénués de risque. Il faut trouver le bon équilibre entre dimension participative et approche structurante, savoir susciter la participation de chacun tout en gérant les attentes, et opérer les bons arbitrages. Pourtant, ne pas prendre ce risque c’est s’exposer demain, dans un contexte extraordinairement mouvant et incertain, à ne pas être en mesure de réagir assez bien et assez vite aux surprises que l’avenir nous réserve.

 

Edgar Brandt Advisory

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