Lorsqu’on demande à une/un directrice/teur de société si les employés dans leur entreprise sont équitablement payés, 77% d’entre eux estiment que oui, et s’étonnent, voire s’offensent de la question !
Pourtant, cela ressemble à un déni : en effet, les statistiques et diverses études montrent le contraire. Selon l’étude effectuée par OFS en 2014, les femmes sont payées 18.1% moins que les hommes en moyenne, secteurs public et privé confondus. 40% de cette différence reste inexpliquée par les critères objectifs tels que les niveaux de formation et de qualification, la position professionnelle ou les années de service. Cette différence représente une perte de gain mensuelle moyenne de 597 CHF pour une femme, soit environ 7’000 CHF par année !
D’où viennent ces réticences à se poser la question si l’on est un employeur véritablement soucieux d’équité ?
Les employeurs ont l’impression de ne pas se préoccuper du genre de leurs collaborateurs et de donner les mêmes opportunités à tous. Malheureusement, le fait de ne pas se soucier des différences entre hommes et femmes conduit involontairement à une discrimination salariale. En effet, il est reconnu que les femmes ont plus de mal à négocier un salaire lors de l’entretien d’embauche ou lorsqu’elles demandent une augmentation, ce qui peut ainsi créer un écart dès l’entrée dans l’entreprise, qui se creuse ensuite au fil des promotions : « seules sont promues les femmes dont les compétences sont très supérieures à la moyenne ».
Les employeurs sont de bonne foi lorsqu’ils estiment ne pas être discriminants, et en général les employés (y compris les employées !) ont le même sentiment. Tous ont l’impression que la nature fait bien les choses, ce qui est renforcé en Suisse par une tendance profonde au libéralisme : les débats au Parlement lors des discussions sur l’égalité salariale arguaient que trop d’éléments pouvaient expliquer un écart salarial pour pouvoir avoir la certitude d’une discrimination liée au genre.
Pourtant, il existe une solution scientifique qui permet de comparer les salaires des employés pour des travaux égaux ou de valeur égale. Le Bureau Fédéral de l’Egalité a développé un modèle mathématique fiable d’un point de vue statistique pour identifier les différences de salaires dues au genre. Ce modèle a, du reste, été repris dans d’autres pays, où il est même utilisé comme outil pour sanctionner la non-conformité des entreprises par des amendes.
En conclusion, plutôt que de présumer que l’on respecte les règles et l’égalité entre les genres, il vaut mieux se poser la question, évaluer sa politique salariale et avoir une bonne surprise plutôt que de continuer à contribuer à la discrimination.
Non, il n’y a pas d’inégalité salariale dans mon entreprise! (Murielle Madrona)